Projet de Téléphérique au Havre
Le tramway aérien n'est pas uniquement réservé aux stations de ski. Dans le monde, on ne compte plus les villes qui en sont équipées. Alors pourquoi pas Le Havre ?
Le Havre ressemblera-t-elle un jour à une station de sports d'hiver ? Prendra-t-on le téléphérique pour aller travailler au lieu d'emprunter le bus ou même le tramway ?
C'est ce dont rêve en secret Jean-Luc Saladin. L'homme, connu notamment pour ses activités de médecin et de conseiller municipal en charge des modes doux de transport, est aussi le fondateur de Sabine en 1989, une association qui vise à développer l'usage du vélo en ville.
L'idée de téléphérique urbain, également appelé tramway aérien, a commencé à germer dans son esprit il y a cinq ans maintenant. Petit à petit, «j'ai monté mon dossier». Il rencontre alors Pierre Jaussaud, expert auprès de la cour d'appel de Grenoble pour les transports par câble [NDLR: lire ci-dessous], puis fait la connaissance d'Isabelle Loirat, guide interprète et élue MoDem à Nantes, qui milite depuis deux ans pour la construction d'un téléphérique comme nouveau franchissement de la Loire. Jean-Luc Saladin organise même un rendez-vous entre le directeur commercial d'une société de construction de remontées mécaniques et des responsables à la Ville et à la communauté d'agglomération havraise.
«Cette idée, je l'ai présentée en interne il y a trois ans quand le projet de tramway est sorti, poursuit-il. La facture aurait été divisée par quatre avec le tramway aérien. Pour deux fois moins cher, on aurait eu le même réseau et l'extension à l'hôpital Monod pour transporter les visiteurs et même les malades.» Un hôpital difficile d'accès aux heures de pointe. Si le tramway est aujourd'hui lancé - les travaux débutent au printemps pour une mise en service prévu à l'automne 2012 - une solution intermédiaire aurait pu être envisagée, selon les partisans de la télécabine: celle de construire un téléphérique parallèle au tunnel Jenner pour relier la ville basse à la ville haute, ou encore une ligne aérienne qui permettrait de rallier la plage ou la gare aux Jardins suspendus.
Mais selon eux, l'idée est trop novatrice. «Il y a un côté pionnier, reconnaît Isabelle Loirat, qui se satisfait de la décision du député-maire de Nantes Jean-Marc Ayrault de lancer une étude de faisabilité. Au départ, on en a pris plein la figure. Nous, on y croyait vraiment.» Sur les bords de Loire, le projet est en balance avec un pont. «Les transports d'aujourd'hui seront ceux de demain», clame Pierre Jaussaud. Alors rendez-vous dans dix ans.
Vanessa Leroy
On est quand même sympa de donner ainsi une image pionnière à Jean-Marc Ayrault non ? I.L.
3 questions à… Pierre Jaussaud
« Au Havre, ce serait souhaitable »
Pierre Jaussaud est expert auprès de la cour d'appel de Grenoble pour les transports par câble et président de l'association Le Chaînon manquant, qui «vise à sensibiliser les élus à l'intérêt du tram aérien pour la collectivité».
Quels sont les points forts d'un téléphérique urbain ?
«D'abord son coût: un tramway coûte cher. A Grenoble, la ligne C revient à 39 millions d'euros du kilomètre. Au Havre, il faut ajouter le prix du tunnel. Le même parcours avec le transport par câble, c'est 7,5millions d'euros du kilomètre avec un arrêt tous les 650 mètres. Autre avantage: le tramway aérien peut transporter jusqu'à 3600 personnes par heure contre 2400 maximum pour le tramway au sol. Enfin, sa construction est facile puisqu'elle ne nécessite que six mois de travaux et sa consommation d'énergie est faible.»
Un tel équipement a-t-il sa place au Havre?
«Techniquement, c'est jouable et ce serait même souhaitable. Reste à fixer le nombre d'arrêts. La première fois que je suis venu au Havre, j'ai rencontré les gens de la Codah. Ils ne m'ont pas pris au sérieux. A l'heure actuelle, on décide de faire un tram car toutes les villes en ont un, alors on ne se pose pas de questions.»
Pourquoi le tramway aérien n'est-il pas plus développé en France?
«Les Français sont très conservateurs, rétifs aux changements. Les arguments que j'entendais contre le tramway dans les années 1970, je les entends aujourd'hui contre le transport par câble. Mais les mentalités sont en train de changer.»
Les villes qui ont osé
Lisbonne, Singapour, New York, Cologne, Barcelone, Medellin, Madère, Taipe, Caracas, Rio, Constantine… Quel peut donc bien être le point commun entre ces villes? Toutes disposent d'un téléphérique urbain. Mais le premier téléphérique urbain au monde a vu le jour en France, à Grenoble, en 1934. Depuis sa mise en service, ce tramway aérien a transporté plus de douze millions de voyageurs. Environ 250000 personnes l'utilisent chaque année. Ses cabines, qui ressemblent à des bulles, peuvent accueillir six personnes maximum. D'autres projets sont actuellement en cours dans la ville et autour de Grenoble.
Par ailleurs, des projets de construction existent à Milan, Montréal, Toulouse, Nice ou encore à Limeil-Brévannes (Val-de-Marne). A Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), le maire André Santini a, lui, renoncé à installer un téléphé-rique dans sa commune, faceà la pression de certains habitants.
Source : http://www.havre-presse.fr/index.php/cms/13/article/301166/Un_telepherique_en_ville